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Initiation à la Théologie de la Nouvelle Evangélisation (4)

Le chapitre 2 de l’Exhortation apostolique Evangelii nuntiandi présente tous les éléments essentiels de l’action évangélisatrice. Paul VI résume ainsi, au numéro 24, les 7 étapes de ce processus : « renouveau de l’humanité, témoignage, annonce explicite, adhésion du cœur, entrée dans la communauté, accueil des signes, initiative d’apostolat » (EN, 24).

Des critères d’évaluation aux projets d’évaluation

Ce chapitre est très important. Il permet un éclairage profond sur ce qu’est l’action évangélisatrice de l’Église. Tout projet d’évangélisation trouve dans ce chapitre les critères d’évaluation fondamentaux, premiers et incontournables. Non seulement ces éléments doivent être considérés selon leur point de vue particulier, mais aussi selon la perspective d’ensemble. Ces éléments s’articulent organiquement et se complètent dans une harmonie parfaite. C’est seulement selon cette « vision globale » (EN, 24) qu’on peut envisager les points déterminants qui suivront dans les quatre autres chapitres : le contenu, les moyens, les destinataires et les ouvriers de l’évangélisation.

Il vaut donc la peine de bien comprendre ces éléments dans leur complémentarité, leur mutuel enrichissement et leur intégration réciproque. Ces éléments s’articulent d’une manière organique. Le modèle biologique peut être d’un grand secours. Les paraboles évangéliques ne sont-elles pas une référence obligée pour saisir en profondeur l’action évangélisatrice du Christ Jésus ? La semence est semée dans le terreau culturel d’un milieu déterminé. Le témoignage de foi, d’espérance et de charité est semé avec discrétion. Plus ce témoignage de vie étend ses racines dans les profondeurs de la terre, plus le témoignage explicite et oral aura une crédibilité ou pour poursuivre l’analogie aura une ramure ample et développée.
Le témoignage de vie humble et caché permet une annonce explicite, qu’elle soit kérygmatique ou catéchétique. Puis vient le temps de la floraison dans l’adhésion à la vie communautaire préparée par une conversion radicale. Enfin, il y aura la production des fruits dans un apostolat fervent. La vie de la plante nous permet de comprendre que ce processus d’évangélisation forme une totalité à travers tout son développement temporel. Il s’agit de croissance.

L’action évangélisatrice fonctionne exactement comme le développement biologique de la plante. Il faut respecter chaque étape de croissance, sans chercher à ralentir le développement ou à le provoquer de manière artificielle. On ne peut omettre un seul des éléments puisque chacun a une valeur déterminante et essentielle pour la croissance globale. En fait, la vie de la plante est conditionnée par la dynamique de son développement à travers l’élément stable de son identité de plante. Il en est de même pour l’évangélisation comme processus global. C’est pour cela qu’il est si difficile d’atteindre « la pleine compréhension de l’activité évangélisatrice de l’Église ». Dans un monde si technocratique et bureaucratique, comment une mentalité organique d’intégration aura-t-elle sa place au coeur de l’Église pour permettre une juste conception de la mission évangélisatrice de tous les baptisés ?

Un processus global

Nous avons utilisé l’expression « processus global » pour caractériser la mission évangélisatrice de l’Église. Effectivement, dans certains textes récents du magistère ecclésial, on emploie l’expression « processus d’évangélisation ».

Le tout dernier Directoire général pour la catéchèse (publié par la Congrégation pour le Clergé en 1997) situe l’activité catéchétique de l’Église dans le contexte de la mission évangélisatrice qui la précède et lui permet d’atteindre sa pleine fécondité. Après avoir affirmé que « l’évangélisation doit être conçue comme le processus par lequel l’Église, animée par l’Esprit, annonce et diffuse l’Évangile dans le monde entier » (n° 47), on énumère six caractéristiques ou étapes de ce processus.

Nous citons ce passage qui résume très bien le chapitre 2 de Evangelii nuntiandi :

- [Première étape] « - l’Église, animée par la charité, imprègne et transforme tout l’ordre temporel, en assumant et en renouvelant les cultures ;

- [Deuxième étape] - elle témoigne parmi les peuples de la nouvelle manière d’être et de vivre qui caractérise les chrétiens ;

- [Troisième étape] - elle proclame explicitement l’Évangile, au moyen de la ‘‘première annonce’’, en appelant à la conversion ;

- [Quatrième étape] - elle initie à la foi et à la vie chrétienne, par la ‘‘catéchèse’’ et les ‘‘sacrements d’initiation’’, ceux qui se convertissent à Jésus-Christ, ou ceux qui recommencent à marcher à sa suite, en incorporant les uns et les autres dans la communauté chrétienne ;

- [Cinquième étape] - elle développe sans arrêt le don de la communion chez les fidèles, par l’éducation permanente de la foi (homélies, autres formes du ministère de la Parole), les sacrements et l’exercice de la charité ;

- [Sixième étape] - elle ne cesse de promouvoir la mission, en envoyant tous les disciples du Christ annoncer l’Évangile, en paroles et en oeuvres, dans le monde entier. »

La vision intégrale de l’évangélisation

Ce texte nous révèle que le processus d’évangélisation implique une méthode d’intégration puisqu’il s’agit de développer une :

- Vision globale : les éléments ne sont pas opposés mais complémentaires.

- Vision de totalité : chaque élément est lié à tous les autres éléments et permet à tous ces éléments d’être vivifiés.

- Vision organique : chaque élément contient en quelque sorte l’ensemble des éléments ; l’évangélisation implique en même temps chaque élément de l’ensemble et la totalité de l’ensemble, ie que chaque élément doit être évangélisateur sans prétendre être à lui seul l’évangélisation et que dans ce processus il y a un acte spécifique, premier, déterminant et essentiel d’évangélisation pour la vitalité de toutes les autres étapes de la vie ecclésiale.

- Vision dynamique : dans « l’unité d’un seul mouvement », il s’agit d’une « activité » qui unifie l’Église et lui donne vie.

La vision intégrale de l’évangélisation est donc plus qu’une méthode. Il s’agit d’une réalité vivante, biologique, organique. En ce sens, l’activité évangélisatrice peut être qualifiée de prioritaire, essentielle, fondamentale, urgente et « exclusive ». Oui, « exclusive » parce qu’intégrative, parce qu’elle seule, selon le mandat missionnaire confié par le Christ ressuscité à toute l’Église (il s’agit bien d’un mandat de re-création), permet la vie et la fécondité de toute l’Église et de toutes les activités ecclésiales. Oui, exclusive, dans la mesure où nous saisissons bien le sens de l’intégration.