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Pie XII et la Shoah

Cependant, un examen des faits met un terme aux accusations portées à l’encontre du pape par certaines parties, dont aucune ne peut être qualifiée sérieusement d’historien. Les points principaux à considérer sont les suivants :

- Alors qu’il n’était pas encore pape, le cardinal Pacelli avait rédigé l’encyclique papale, Mit Brennender Sorge, dans laquelle Pie XI dénonçait tant le paganisme azi que son caractère raciste ; ce document fut introduit en cachette en Allemagne en mars 1937 et lu en chaire dans toutes les églises catholiques, à la grande rage des Nazis ;

- Des chercheurs juifs, par exemple Joseph Lichten de B’nai B"rith, ont démontré, documents à l’appui, que Pie XII avait utilisé les finances du Vatican pour racheter des Juifs aux Nazis et que le Vatican, sous son pontificat, avait entretenu un réseau étendu de planques. Même la résidence d’été du pape, Castel Gondolfo, a servi de cachette pour des juifs fugitifs. Le pape, du reste, a pris lui-même la responsabilité du sort des enfants des juifs expulsés ;

- En grande partie en raison des efforts de l’Eglise, le taux de survie parmi les juifs d’Italie fut bien plus élevé que dans d’autres pays ; les éstimations du nombre de juifs sauvés grâce aux efforts du Vatican s’élèvent à plusieurs centaines de mille ; ce fut l’une des raisons pour lesquelles le grand Rabbin de Rome s’est converti au catholicisme à la fin de la guerre ;

- En reconnaissance de l’action entreprise par Pie XII en faveur des juifs, le Congrès Juif Mondial fit don au Vatican d’une grande somme d’argent en 1945 ; la même année, le Rabbin Herzog de Jérusalem a adressé au pape « une bénédiction spéciale » en remerciement de ses efforts de sauvetage au nom des juifs pendant l’occupation nazie de l’Italie » ; et, à la mort de Pie XII en 1958, la ministre des affaires étrangères israélienne, Golda Meir, a prononcé son éloge funèbre aux Nations Unies pour la même raison ;

- Qu’est que Pie XII aurait eu à gagner en se mettant en avant et à tempêter à l’encontre des Nazis ? Tant la Croix Rouge Internationale que le Conseil Mondial des Eglises en étaient venus à la même conclusion que le Vatican, à savoir que les efforts pour venir en aide aux juifs seraient plus efficaces si ces organisations opéraient de manière plutôt discrète ; et pourtant, on n’entend personne attaquer la Croix Rouge pour son « silence » à propos de l’Holocauste ;

- En 1942, l’épiscopat catholique à Amsterdam s’est exprimé publiquement et avec vigueur contre le traitement infligé aux juifs par les nazis ; la réponse nazie fut de redoubler les rassemblements et les déportations si bien qu’à la fin de la guerre, 90 pour cent des juifs d’Amsterdam avaient été liquidés. Les membres des agences juives partageaient entièrement la vue selon laquelle une critique publique de la part du Vatican n’aurait pas eu le moindre effort sur Hitler et qu’au contraire elle aurait sérieusement mis en péril la vie des nombreux juifs cachés dans les couvents, les monastères etc ;

- Cependant, à l’occasion de son message de Noël 1942, Pie XII a décrié le fait que des centaines de milliers de personnes étaient persécutées « en raison de leur seule race ou extraction. » L’ambassadeur allemand auprès du Vatican s’était plaint que le Pape « de toute évidence s’exprimait au nom des juifs ». Un éditorial du journal The New York Times, publié le jour de Noël 1942, louait Pie XII comme une « voix isolée résonnant dans le silence de tout un continent » ;

- Le mensonge calomnieux selon lequel Pie XII, d’une façon ou d’une autre, se serait fait complice de la solution finale a pris corps avec la pièce de théâtre de Rolf Hochhuth, Le Député, en 1962, qui est une fabrication de toutes pièces. On n’a pas besoin d’être un grand psychologue pour percer la raison qui a poussé cet auteur allemand : on l’appelle transfert de culpabilité ;

- Finalement, quelques mots à propos du concordat conclu en 1933 entre le Vatican et le gouvernement nazi, et que Pie XI avait signé à contrecœur : de tout temps, le Vatican a pu être amené à conclure des concordats avec des gouvernements dont elle réprouve l’activité ; le premier devoir de l’Eglise est de servir les catholiques où qu’ils soient et elle est obligée d’entretenir un Modus Operandi avec tous les gouvernements, même (ou particulièrement) les mauvais parmi eux. Le concordat allemand fournissait aux catholiques des garanties en matière de mariage, protégeait l’enseignement catholique et prévoyait la création de nouveaux diocèses ; le concordat n’a jamais eu pour intention de fournir un appui au gouvernement nazi, que l’Eglise a du reste condamné à maintes reprises.

- Voilà un résumé de la situation. L’action de l’Eglise ne fut peut être pas parfaite, mais quelle autre institution peut aujourd’hui s’enorgueillir d’avoir autant entrepris ?

(Une version de ce mémoire rédigé par George Sim Johnston a été publiée par le magazine CRISIS.)